La biopharma franco-allemande co-fondée par Kurma Partners prépare l’entrée en préclinique de son premier anticorps conjugué pour lutter contre les cancers avec une levée sursouscrite de 87 M€ fournie par un pool dominé par les anglo-saxons.
Article CFNEWS, publié le 23 décembre 2021
Emergence Therapeutics… émerge ! Jusqu’alors plutôt discrète, la biopharma fondée en 2019 avec le concours de Kurma Partners et établie à la fois à Marseille et Duisburg, en Allemagne, vient en effet de boucler un tour de série A de 87 M€, sursouscrit de surcroît. La jeune société développe de nouveaux ADC (antibody drugs conjugates), une classe de médicaments où un anticorps est lié à une toxine avec un ligand. Ceux-ci sont censés attaquer la cellule cancéreuse en visant un antigène déterminé mais épargner les cellules saines (à la différence de la chimiothérapie qui attaque les cellules de façon indifférenciée). « Nous avons favorisé les investisseurs anglo-saxons de type crossover dans la perspective d’une future IPO sur le Nasdaq », explique Thierry Laugel, associé de Kurma Partners. Mené par le fonds israélien Pontifax, le tour réunit les américains RA Capital Management, un VC spécialisé dans la santé qui vient de lever son 3ème fonds de venture de 880 M$, OrbiMed Advisors, qui a collecté 1,5 Md$ pour son fonds de venture dédié aux biotechs et medtechs, Surveyor Capital (une société du hedge fund de Chicago, Citadel), et un européen (tourné vers les pays nordiques), Hadean Ventures, en tant que nouveaux investisseurs. Les investisseurs existants Kurma Partners, NRW.BANK (la banque publique de développement de la Rhénanie du Nord-Westphalie), High-Tech Gründerfonds, Gründerfonds Ruhr et Bpifrance à travers son fonds InnoBio 2 se sont joints à eux, ainsi que le management.
Premiers essais sur les patients en 2023
Avec une équipe de scientifiques basée historiquement à Marseille qui, après s’être approchée de Heidelberg Pharma pour tester l’un de ses toxines (non retenue d’ailleurs) a noué des liens puissants avec l’Allemagne au point de s’y installer aussi, Emergence Therapeutics est un « designer » d’ADC. Son premier anticorps conjugué à un médicament, ETx-22, cible la Nectine-4. Cet antigène tumoral découvert à l’Institut Paoli-Calmette de Marseille est une molécule massivement exprimée par les cellules tumorales mais pas par les cellules saines, ce qui en fait une cible de choix, validée par un pionnier des ADC, l’américain Seagen (ex Seattle Genetics) qui la cible également avec un produit déjà enregistré. « Les premiers essais réalisés par Emergence démontrent que son anticorps est de meilleur qualité que celui de l’américain, de même que son ligand qui conserve la toxine, elle-même très puissante, et la libère de façon préférentielle dans l’environnement tumoral. ETx-22 présenterait ainsi un indice thérapeutique dix fois supérieur à celui du produit immuno-conjugué déjà sur le marché », estime Thierry Laugel. La biotech, qui avait déjà levé 6 M€ en seed (subventions comprises) vise en premier lieu les cancers de la vessie et du sein triple négatif, puis des tumeurs malignes avec des niveaux moyens et faibles de la Nectine-4 à l’instar des cancers de l’ovaire, de la tête, du cou et du poumon. Le financement qu’elle vient d’obtenir lui permet d’entrer en phase préclinique réglementaire pour de premiers essais sur les patients prévus en 2023. En parallèle, la société biopharmaceutique qui emploie une dizaine de personnes entend développer un pipeline d’autres candidats médicaments ADC.